COMMÉMORATION DU DÉCRET DU 25 AOÛT 1942 INCORPORATION DES MALGRÉ-NOUS
Le 23 août 1942 paraît le “Décret du Ministère de l’Intérieur du Reich sur la nationalité en Alsace, en Lorraine et au Luxembourg”, accordant la nationalité allemande aux habitants de ces régions : sont considérés comme Allemands les personnes de souche allemande, c’est à dire dont les deux grands parents sont allemands, sont nés en Alsace, en Lorraine ou ailleurs dans le Reich.
Le 25 août 1942 pour l’Alsace et le 29 pour la Moselle sont publiées les ordonnances sur le service militaire obligatoire dans l’armée allemande pour les Alsaciens – Mosellans. “En vertu des pouvoirs qui m’ont été conférés par le Führer, j’ordonne : 1°- Le service militaire obligatoire dans l’armée allemande est introduit pour les jeunes gens de race allemande en Alsace appartenant à des classes qui seront déterminées par une ordonnance spéciale. 2°- Les hommes appelés sous les drapeaux seront soumis aux mêmes prescriptions en vigueur que les soldats allemands, ils jouissent aussi des mêmes droits que ceux-ci. 3°- Les hommes soumis à l’obligation militaire, mais non appelés au service actif dans l’armée sont soumis aux prescriptions en vigueur pour cette catégorie. 4°- Cette ordonnance entre en vigueur le 25 août 1942.
Ce décret est totalement contraire à toutes les lois internationales, car la convention de La Haye du 18 octobre 1907 concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre, contient une disposition visant à codifier les droits de l’occupant sur la population occupée. Elle stipule qu’un droit de réquisition au profit de l’occupant est prévu dans les articles 52 et 56, mais « qu’il est également interdit à un belligérant de forcer les nationaux de la partie adverse à prendre part aux opérations de guerre dirigées contre leur pays »
(article 23 alinéa 2). Pour prévenir la fuite des mobilisables, les nazis mettent en place dès le 21 septembre 1942 un cordon de gardes frontières dans une zone interdite de 3km de profondeur le long des Vosges et de la frontière suisse. Quiconque est repéré dans cette zone est considéré comme déserteur. Naturellement, Vichy proteste, mollement et sans effets.
Des familles prises en otage. La répression extrêmement brutale qui a frappé tous ceux qui se sont opposés à l’incorporation de force et les mesures de transplantation prises à l’égard des familles des réfractaires vont inciter la plupart des malgré-nous à répondre à l’ordre d’appel. Mais beaucoup d’entre eux partent avec le secret espoir de passer dans les lignes alliées à la première occasion possible.
L’OKW, qui fait à juste titre preuve de méfiance vis-à-vis des Alsaciens-Mosellans va interdire, dès décembre 1942 leur envoi à l’ouest (France, Belgique et Pays-Bas).
Sur le front russe où une propagande particulière est faite à leur égard, les désertions sont plus difficiles. Encore limitées en 1943, elles vont atteindre leur maximum en 1944 surtout après le débarquement en Normandie. Bon nombre de malgré-nous vont alors se cacher en Alsace à la suite d’une permission. L’OKW va interdire toute permission à destination de l’Alsace-Moselle à partir du 6 septembre 1944 (Urlaubsperre) pour éviter une fuite encore plus massive. Les insoumis et les déserteurs sont activement recherchés par la Feldgendarmerie et toutes les forces de police. Le nombre des évadés de la Wehrmacht est particulièrement impressionnant. Plus de 15 % des Alsaciens qui ont été incorporés ont déserté d’une manière ou d’une autre. Si on y rajoute les réfractaires, on constate que près du quart des effectifs concernés par l’obligation militaire sous toutes ses formes s’est soustrait à la Wehrmacht, ce qui constitue incontestablement un record.
Les Alsaciens n’ont donc pas à rougir de cet épisode douloureux du passé. Abandonnés par la France de Vichy et livrés à eux-mêmes, ils ont lourdement payé le prix de l’incorporation de force. Source : Eugène Riedweg, DNA du mercredi 14 juillet 2004
Environ 100 000 Alsaciens et 30 000 Mosellans et 10 000 Luxembourgeois furent incorporés de force.
Ces effectifs forment l’équivalent de plus de dix divisions, ce qui est loin d’être négligeable.
Sur les 130 000 incorporés de force Alsaciens et mosellans, environ 88 000 vont revenir au pays. 42 500 sont morts, dont près de 32 000 Alsaciens. 40 000 ont été blessés. Parmi les morts, 22 000 sont morts dans l’armée Allemande, les autres sous les balles de l’armée rouge, immédiatement fusillés, ou dans divers camps soviétiques.
Le nombre de tués sur le front augmenta notablement à partir de l’été 1944. A la fin du conflit, le bilan sera encore plus lourd, en raison de la violence des derniers combats et des conditions de détention extrêmement dures, dans les camps de prisonniers soviétiques.